Lorsque l’héroïne rencontre Ariane, elle est loin d’imaginer le tour toxique que va prendre leur relation… Attention, on est loin ici de la mièvrerie des amitiés adolescentes et le lecteur est vite pris dans un tourbillon qui le dépasse. En priant très fort pour ne jamais croiser le chemin d’une Ariane…
Un roman assez glaçant sur un thème que l’on retrouve souvent en littérature, les amitiés adolescentes, mais qui ne laisse ici aucune place à la mièvrerie…
Ariane, c’est la jeune fille solaire, belle, bien élevée, que tout le monde convoite au collège de cette ville grise et terne de Belgique. Intouchable, insondable adolescente, petite bourgeoise aux tenues à la dernière mode, à la famille modèle avec piscine et court de tennis à domicile.
C’est celle à qui la narratrice voudrait ressembler, celle qu’elle voudrait avoir comme amie, sachant pourtant qu’elle est aux antipodes de ce milieu… Issue d’une famille qui veut sauver les apparences mais qui ne parvient pas à faire illusion, elle reste une fille de prolétaire, qui ne connaît rien aux codes de la petite bourgeoisie, et qui tente de se défaire de ses habitudes « populaires » en copiant les jeunes filles du collège privé dans lequel elle évolue tant bien que mal.
« Ariane osait tout. Moi, je n’osais rien, sauf quand elle me regardait. »
« …elle était exactement, naturellement, celle que je m’efforçais d’être. Grandiose. Inquiétante. »
Et pourtant c’est bien sur elle qu’Ariane jette son dévolu. Les deux jeunes filles deviennent vite inséparables, s’appelant pendant des heures sur le téléphone fixe familial, ne se quittant ni au collège ni le week-end, tombant amoureuses des mêmes garçons et les piégeant dans un jeu cruel, excluant quiconque tenterait d’entrer dans leur duo étrange et excentrique.
Mais la famille d’Ariane est-elle aussi bien sous tous rapports qu’elle en a l’air ? Quand on entre dans l’intimité des gens, on découvre que tout n’est peut-être pas aussi lisse que les apparences. Et lorsque la machine se grippe, et qu’Ariane se révèle être une tout autre personne, il est peut-être déjà trop tard pour sortir de sa vie…
Un roman au langage cru, qui dit tout de l’adolescence et des amitiés qui se font et se défont, à en devenir toxiques, de la manipulation et de la recherche de personnalité. L’auteure n’épargne pas grand-chose à ses héroïnes. Ariane, on la déteste, mais on finirait presque par ressentir de la compassion pour cette jeune fille perdue… Un livre qui se lit presque comme un thriller, tant on est tenu en haleine par une intrigue sous tension, où chaque instant nous fait douter. Qui manipule ? Qui est manipulé ? Où s’arrêtent les cruautés de l’enfance, et où commence la folie ?
« J’ai modifié les noms, parfois les métiers, j’ai emprunté des raccourcis, quelquefois rallongé, j’ai fait le ménage dans le paysage, mélangé les dates, créé des fausses conséquences à partir de causes réelles et vice versa. Mais je crois sincèrement qu’après tout cela, tous ces petits et grands accommodements, je vous raconte la vérité vraie, la vérité nue, plus vraie encore que lorsque je l’ai vécue. » – Amélie Muller
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Un véritable coup de cœur pour moi. Il ne m’aura pas fallu longtemps pour dévorer les 200 pages de ce roman pétillant !
L’histoire se passe en Belgique, en Brabant wallon, une province au sud de Bruxelles. Deux jeunes filles se lient d’amitié, une amitié si forte qu’une dépendance se crée et qu’une forme d’amour va naître. La narratrice est issue d’une famille modeste qui fait tout pour s’intégrer dans la classe sociale supérieure. Elle sera donc inscrite dans une école privée dans laquelle ses camarades seront issues de famille “nobles”. Là, elle fera la rencontre d’Ariane, sublime et parfaite à ses yeux. La famille d’Ariane est riche, différente des autres familles, quelque peu loufoques. Les deux amis vont vivre une amitié singulière et faire les 400 coups ensemble jusqu’à une tragique journée où la désillusion fera son apparition…
La narratrice n’est pas de prénom et au fil des pages l’auteure laisse le doute quant à la véracité de cette histoire et son caractère biographique. C’est vrai que du coup à la fin du roman, on aimerait bien savoir !!
J’ai beaucoup apprécié le style direct, cru (qui m’a surpris dans les premières pages) mais qui correspond complètement au langage adolescent. Pour moi, un superbe premier roman qui montre comment la vécu d’un adolescent peut influer sur la vie d’adulte sans oublier la cruauté dont peuvent faire preuve les ados entre eux. – Nina Busson Boulonne
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Dans son premier roman, Ariane, la journaliste belge Myriam Leroy aborde le thème compliqué des amitiés toxiques adolescentes et leurs conséquences sur la construction des individus.
La narration est à la première personne. Rien n’indique si ce JE est purement fictionnel ou autobiographique. Le récit se situe dans les années 1990 en Belgique, dans une ville de province. La tonalité est plutôt brute, actuelle, sans concessions ni fioritures. C’est une écriture efficace.
Je pense que ce roman ne va laisser personne indifférent ; j’imagine que les ressentis seront très tranchés entre celles et ceux qui auront apprécié et les autres qui n’auront pas aimé ; je ne pense pas qu’il y ait beaucoup de réactions moyennes…
Personnellement, j’ai détesté… Trop clivant, trop sombre, trop de perversités, de rejets… Des milieux très cloisonnés, des familles mal aimantes…, des jeunes filles très retorses… Aucune place pour l’innocence. Les personnages ne sont travaillés que dans leurs côtés obscurs… De la dimension tragique, les deux protagonistes principales ne possèdent que la capacité à provoquer horreur et même dégoût ; pas de place pour l’émotion ou la pitié… Une succession de péripéties très factuelle, aucune place pour l’humour.
J’en garde un goût amer et une impression de malaise.
C’est une lecture que j’ai terminée uniquement parce que ce roman fait partie de la sélection des 68 premières Fois. – Aline Raynaud
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« En 1994, nous vivions en Brabant wallon, une province au sud de Bruxelles située dans l’angle mort de l’analyse sociale et de la production littéraire : elle n’avait jamais inspiré qui que ce soit. »
Dès la page 20 du roman de Myriam Leroy, le ton est donné : rien n’échappera à la moulinette mordante de la causticité. Cette province comme une « prison à ciel ouvert », Nivelles « le gros bourg moche, d’une laideur tout à fait anti-cinématographique« , les parents d’une conformité désespérante, le collège Saint-Sauveur « une école de blonds« , la narratrice elle-même qui se décrit comme « blafarde, binoclarde et pleine de spasmes, mais aussi invraisemblablement habillée« , tout est décrit du point de vue d’une jeune femme jetant un regard effaré et sans concession sur son adolescence. Mais voilà que dans toute cette médiocrité apparaît Ariane, qui devient son amie exclusive. Ariane possède tout ce que la narratrice n’a pas : la beauté, l’élégance, l’argent, le chic, la faconde, la fantaisie… A elles deux, inséparables, elles règlent leur compte aux garçons et aux filles qui les indisposent. Elles créent leur propre monde avec leurs lois, leurs codes, leurs exclusions. Se tisse entre elles une relation forcenée, intolérante, excessive, dont Ariane semble détenir toutes les clés et en abuser férocement auprès de celle qui ne peut croire au bonheur d’avoir été distinguée par cette fille qu’elle juge parfaite en tout. La trahison n’en sera que plus cruelle.
Avec une écriture vitriolée, Myriam Leroy offre une image qui me paraît assez juste des amitiés adolescentes et de leur portée sur des personnalités en formation. Ces relations vénéneuses, enrichissantes ou aliénantes, égoïstes et intolérantes, aux choix arbitraires, semblent n’exister que pour s’affranchir du poids des conventions familiales en se confrontant à une tyrannie bien plus despotique : celle de la « meilleure amie ». Bien mystérieux restent, vus de l’extérieur, leur fonctionnement, leurs configurations mouvantes et leurs limites. Ces mécanismes de domination et soumission apparaissent en filigrane de l’histoire. Je regrette un peu qu’une astuce scénaristique explique en quelque sorte les actes du personnage d’Ariane. Le roman m’a semblé en perdre un peu de sa force. Malgré cela, c’est un roman que j’ai beaucoup aimé. – Merlieux Lenchanteur
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Lu d’une traite parce que l’écriture narrative est fluide et facile. Les phrases s’enchaînent.La narratrice ne cherche pas à se valoriser. Elle renie son milieu familial conditionné par des principes rigides.
Elle a treize ans, c’est le début de l’adolescence et de ses excès, de ses jugements sans concessions. Arrive une petite nouvelle, dans cette école pour riches où sa mère a voulu l’inscrire, et ce sera une amitié fusionnelle, exclusive, comme cela peut exister à cet âge.
La suite est sidérante. J’ai lu sans déplaisir, comme un fait divers quelconque, sans grand intérêt. La meilleure conclusion est donnée par l’auteur elle_même.
“Thérapie classique par l’écriture. On est loin de la littérature”. – Mireille Hurard-Lefustec
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« Eh bien, Ariane et moi, nous nous sentions les gardiennes de la prison mentale de ceux qui nous entouraient. Entre répugnance furieuse et haine amusée, nous nous croyions invisibles, invincibles, immortelles. » L’histoire ne m’a pas étonnée par son originalité (malheureusement) et je n’ai pas été la proie d’un suspens qui pour ma part était absent. Plus qu’un parcours narratif, j’ai lu et apprécié ce roman comme une peinture. La nocivité de cette amitié adolescente est insupportable mais est bien au centre de ce récit, fictif, réel ou trafiqué, qu’importe : la splendeur du nocif nous éclabousse ! Le talent réside dans la véracité du propos, la justesse presque clinique des personnages, de leurs âges pubères, de l’environnement familial, du décor. « Maman, qui se sentait amputée d’un prestige dont le membre fantôme la grattait, pensait qu’à force de déguisements, d’imitations et d’opportunisme relationnel, elle donnerait à notre nom de famille le lustre qui aurait dû lui revenir. »
C’est sombre, féroce, parfois indigeste mais la langue de l’auteur est si incisive, directe et brillante pour nous décrire un caractère, une ambiance, que je n’ai pu qu’admirer le tour de force d’une écriture à retenir. L’humour y est virulent, ne nous ménage pas vraiment des plages de repos, et nous soutire le rictus soufflé devant l’audacieux et l’intelligent des métaphores qui d’emblée nous projettent ce qu’il y a à voir ou comprendre. Les mots nous cognent, nous boxent : le style est lapidaire, sans répit et les uppercuts sont précis et cinglants ! A l’image du pulsionnel en action et de la violence, ici et donc possiblement abjecte, qui agite les corps bouleversés des jeunes gens en mutation…
Le parti pris de Myriam Leroy n’est pas de développer l’avant ou l’après, les psychologies familiales, les failles, malgré l’impact dévastateur sur la vie adulte de la narratrice de cette amitié dévorante. La narratrice laquelle n’a pas de prénom et se fond, se perd dans le double adoré et haï d’Ariane, et se confond dès lors à l’auteure. Celle-ci en joue un peu et jette le trouble sur la véracité du vécu, dans quelle visée sinon rappeler la duplicité et les ombres de toute identité, fussent-elles inconscientes, les jeux dangereux de l’identification qui laisseront le goût amer de la fin ? Je salue donc le travail de la langue pour décrypter les liens toxiques en adolescence et nous immerger au cœur de scènes insoutenables de sadisme et de désespoir. « Alors que la vérité, c’est que j’avais le palpitant déchiré en mille morceaux sanguinolents, sur lesquels Ariane se plaisait à verser de l’urine pour en raviver la douleur. Blessure qui continue à me lancer aujourd’hui comme un mauvais point de côté sur lequel la vague consolatrice du temps ne cesse de se briser pitoyablement. » – Karine Le Nagard
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Qui était vraiment Ariane ? C’est la question que se pose la narratrice revenant sur son adolescence dans une bourgade triste de Belgique, elle issue d’un milieu modeste, bourrée de complexes, élevée par des parents austères, élue un jour amie de la fabuleuse Ariane.
Ariane est belle, lumineuse, légère, fantasque elle vit dans un autre monde privilégié, riche et désinhibé.
Tout les sépare et pourtant une amitié très forte va les unir. Une amitié toxique en réalité où le lecteur assiste à des échanges de propos féroces, cyniques, crus car elles portent toutes deux un regard sans concession sur la famille, l’école, les jeunes de leur âge, la sexualité, rien ne trouve grâce à leurs yeux. Elles prennent plaisir à humilier les autres, à se jouer du désir des hommes pour mieux les rejeter, leur cruauté est sans limite. Elles se comparent à des siamoises.
Pourtant, cette amitié se teinte de troubles, de doutes, une sorte de bombe à retardement dont on ignore qui sera la victime. Troubles mentaux ? Manipulation ? Qui se joue de qui ?
Superbement bien écrit, je lu ce récit pratiquement d’une traite car l’auteure est virtuose, elle jongle avec les mots, les situations, la tension monte crescendo, un vrai thriller psychologique.
Pourtant je ne sais que penser et au final et dresse un bilan en demi-teinte.
Cette perversité permanente est gênante, voire malsaine et m’a laissée un goût amer. Oui l’adolescence est une période trouble, une rébellion sans limite et ce sujet a été largement exploré dans les romans. Rarement j’ai assisté à une telle noirceur, pas de répit, pas d’humour, pas de grâce, une ambiance poisseuse et malsaine sans une seule lumière vers l’avenir. – Nathalie Chartier – Salou
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C’est l’histoire de deux adolescentes que tout sépare, mais qui vont se lier d’une amitié dure et féroce. Ariane belle et lumineuse, vivant dans un milieu aisé, va prendre sous son aile la narratrice qui est complexée. Elles ne vont plus se quitter et vivre sans codes, sans règles, prenant plaisir à humilier les autres. Amitié malsaine et perverse jusqu’à la tragédie.
Livre époustouflant et dérangeant, mais que j’ai beaucoup aimé. Dès les premières pages, j’ai été happée par cette écriture incisive et très bien maitrisée. Je pense que ce livre ne laissera pas indifférent, de part sa noirceur, son vocabulaire cru et une certaine vulgarité.
« J’ai intégré que l’amour était une humeur normale utile à la perpétuation de l’espèce, le
désir soluble dans l’habitude et l’amitié, une disposition occupationnelle » – Joëlle Radisson
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L’amitié toxique adolescente, l’incompréhension des adultes, le fait de repousser les limites, se créer un monde compris que par soi et l’autre moitié du couple amical fusionnel…
Des thèmes déjà vus et revus quand on parle d’adolescence. Il ne me reste pas grand chose aujourd’hui de cette lecture, même si je l’ai lu d’une traite.
Je crois que ce qui m’a le plus intéressée, mais qui n’est pas poussé assez loin, est toute la partie ou la narratrice s’interroge sur la manière de rendre compte de cette histoire. Parce que ça aborde la question de la fiction basée sur des faits réels (je ne sais pas si c’est le cas ici et en vrai ça m’est complètement égal) – Hélène Goelen
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Pendant sa préadolescence, au collège, l’auteur fait la connaissance d’Ariane avec qui elle partage une fulgurante histoire d’amitié, faite d’exclusivité, de possessivité et de cruauté. Ce lien est d’autant plus fort que leur amitié se nourrit de tous ceux qu’elle exclut et détruit au passage avec la violence et l’intolérance dont les deux adolescentes sont capables. Mais cette amitié ravageuse porte en elle la destruction et elle finira par se consumer elle-même et par détruire avec la même violence cette relation qui les a unies. Myriam Leroy écrit ce roman avec le regard corrosif et sans pitié de l’adolescence, arrosant tout de vitriol : ses parents, son milieu social modeste et celui de son amie, issue, elle, de la bourgeoisie, sa vie et ses rencontres. Le ton du livre est décapant, la plume rapide emporte le lecteur sur la première moitié du livre. Mais, après l’explosion de cette amitié destructrice, l’auteur n’arrive pas à tirer un trait sur cet échec et l’histoire reste suspendue à ce passé douloureux de l’auteur avec Ariane, sans réellement, je trouve, nous conduire ailleurs. C’est pourquoi, après avoir été emportée par le ton et le rythme du début du livre, j’ai trouvé que la deuxième moitié peinait à trouver une nouvelle dynamique et m’a laissé une impression beaucoup plus en demi-teinte. C’est ce contraste entre les deux parties du roman qui me reste comme impression générale sur ce premier roman d’Ariane Leroy.- Nathalie Ghinsberg
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